Eco-conception, sobriété numérique : nous sommes tous concernés !

Ne nous contentons pas de chercher les clés de notre stratégie sous l’éclairage du lampadaire Data

Les technologies de l’information jouent un rôle crucial dans la transition énergétique - par exemple via le télétravail ou la substitution des déplacements par des vidéo-conférences -, mais elles sont aussi elles-mêmes responsables de 5% des émissions de CO2, et ce chiffre est en croissance rapide.

Les services numériques s’appuient en effet sur des infrastructures physiques et induisent donc des consommations d’énergie et de matières, à peu près pour moitié dans la phase de production (ordinateurs, écrans, smartphones, …) et pour moitié dans la phase d’utilisation (terminaux, réseaux, data centers).

On observe par ailleurs une obsolescence accélérée des équipements et des besoins croissants en ressources à fonctions égales (doublement tous les 2 à 3 ans). Ainsi en 10 ans, la quantité de mémoire vive nécessaire pour lire un fichier ou envoyer un courriel a été multipliée par 30…

Compte tenu de la dépendance quasi-totale de notre économie aux outils numériques, la résilience de ces derniers face aux risques qui s’annoncent (perturbations climatiques, disponibilité des énergies fossiles et des ressources minières, risques géopolitiques et sanitaires) est un enjeu majeur.

L’éco-conception et la sobriété numérique

Face à ces défis, comment pouvons-nous agir à notre niveau ? C’est là qu’intervient l’éco-conception, et plus généralement la sobriété numérique. Ces concepts ont émergé très récemment mais sont promis à un bel avenir en tant que préoccupations nécessaires dans le cadre de la conduite de projets, et donc cette sensibilité et ces compétences vont être de plus en plus demandées.

D’abord un constat : il a été estimé que 64% des fonctionnalités développées sont inutiles, car rarement voire jamais utilisées. Chacun de nous en fait quotidiennement l’expérience (quel pourcentage des fonctionnalités de Word ou d’Excel utilisons nous ?).

Pour illustrer cela, le schéma suivant évalue la satisfaction des utilisateurs en fonction du nombre de fonctionnalités :

Ensuite, un petit rappel historique. Jusque dans les années 1980 les ressources informatiques étaient rares et le programmeur/BA devait optimiser son code en conséquence. On expliquait aussi aux utilisateurs que les interfaces graphiques n’étaient pas indispensables à leur travail… La suite est connue : la loi de Moore (doublement de la puissance tous les deux ans) a été observée pendant des décennies, permettant l’essor exponentiel du numérique, mais aussi les dérives évoquées plus haut (de plus en plus de puissance nécessaire à activité égale).

Au niveau des projets, cela s’est traduit par la priorité donnée à l’optimisation du coût de développement (délocalisation en Inde, langage de Xème génération permettant un développement rapide au détriment de l’efficacité du code) par rapport aux coûts d’exploitation.

Malheureusement la loi de Moore atteint aujourd’hui ses limites (la finesse de gravure des micro-processeurs ne peut pas descendre en dessous de la taille des atomes…), montrant une fois de plus l’impossibilité de la croissance exponentielle dans un monde fini (cf. « Les Limites à la Croissance » du Club de Rome, qui a expliqué dès les années 70 ce qui est en train de se passer aujourd’hui…)

Alors que faire concrètement ?

On va sans doute assister à un changement de paradigme dans la conduite de projet, avec l’accent mis de plus en plus sur la sobriété en phase d’utilisation des services numériques : retour des objectifs d’optimisation, élimination des fonctionnalités inutiles, estimation de la consommation d’énergie en utilisation, …

Comme souvent, les leviers principaux pour agir sont au niveau de la conception (si une fonction est inutile, on a beau optimiser son code, elle reste inutile).

Une première action est d’identifier des indicateurs de mesure sur les différentes phases du cycle de vie (développement, utilisation, fin de vie), avec l’accent sur l’utilisation. Par exemple :

  • Consommation d’énergie par rapport au service rendu
  • Accessibilité par les différentes populations utilisatrices
  • Utilité des fonctionnalités offertes
  • Portabilité (pour ne pas subir l’obsolescence du matériel)
  • Temps de livraison par les équipes de développement

Ensuite, les choix technologiques (architecture fonctionnelle et technique, matériel, langages de programmation, …) doivent prendre en compte la performance énergétique.

Les éléments suivants sont alors à prendre en compte dans la conduite de projet :

  • Elargir les enjeux aux sujets environnementaux et sociaux (estimation des coûts d’exploitation, de l’efficience énergétique)
  • Privilégier la transparence et la communication entre les acteurs du projet, pour faciliter la résolution des problèmes
  • (Re)mettre le client utilisateur final au cœur du dispositif, notamment pour réduire les fonctionnalités inutiles
  • Faire de la qualité (c’est-à-dire le coût futur d’utilisation) un élément central, plutôt que de réduire le coût de développement
  • Favoriser l’amélioration continue (identification et sélection des axes d’amélioration) et le « Continuous Delivery » : tester et livrer fréquemment, en industrialisant les processus d’intégration
  • Intégrer dans les tests les indicateurs d’efficacité énergétique

La bonne nouvelle, c’est qu’une part importante de ces principes sont déjà pris en compte dans les approches déjà connues et portées par les méthodes Lean et Agile !

Pascal Cottereau

Pour aller plus loin :

https://www.eco-conception.fr/data/sources/ecoconception-logicielle.pdf

https://theshiftproject.org/article/deployer-la-sobriete-numerique-rapport-shift/

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